L’espoir naïf

Il y a eu un retard de règles de dix jours, un test de grossesse positif, une prise de sang un peu douteuse, et moi qui ai du expliquer la situation à l’échographe quelques jours plus tard alors que mes règles étaient bien là. J’étais gênée, j’avais l’impression d’être la fille qui prend ses rêves pour la réalité. Car qui dit fausse couche précoce dit début de grossesse. Non mais carrément ! Après deux années de stimulations en tout genre qui n’ont rien donné, la fille serait tombée enceinte comme ça, sans même calculer, sans même savoir quand avait eu lieu son ovulation… N’importe quoi !

L’échographe ne s’est pas moquée et n’a pas ri ; elle m’a montré à l’écran mon endomètre encore bien épais, puis un minuscule point gris (dans un océan de gris… à vrai dire je n’ai pas vu grand chose) en m’expliquant qu’il s’agissait d’un « petit corps jaune résiduel », preuve qu’il y a bien eu une accroche et que mon corps y a cru dur comme fer.
Elle a donc fait plus que me croire, elle a confirmé ma théorie farfelue. Sur le bilan à transmettre à Hope, elle a d’ailleurs noté « résultats à interpréter en fonction du contexte : fausse couche précoce ». Ecrit noir sur blanc.

Alors petit à petit je réalise. Et l’incrédulité heureuse du début laisse place à une prise de conscience un peu amère : on a effleuré du doigt notre rêve pour la toute première fois… sans pouvoir le toucher vraiment. Sans que cela nous avance plus, finalement.
Depuis, j’oscille entre espoir fou d’y arriver bientôt un jour et désespoir profond que la seule chose qui nous soit jamais accordée soit une fausse couche précoce. Je pense à ce petit embryon qui, à l’inverse de ses frères dopés, a réussi à (sur)vivre jusqu’à l’implantation, et cela  me donne l’impression que nous avons finalement peut-être plus de chances que ça marche au naturel qu’en PMA.
Comme des envies d’une longue pause tout d’un coup… Psychoti est un peu dans le même état d’esprit, puisqu’il a proposé « Et si on rachetait des tests d’ovulation ? ».

J’ai bien peur qu’on ne tombe de haut quand sonnera l’heure de la fin du cycle. Et définitivement, je réalise que la gestion de l’espoir n’est pas notre fort : pas d’intermédiaire, on passe du fond de la vallée au haut de la montagne en un claquement de doigts.
Les trois années d’essais ne nous ont malheureusement pas appris à mieux réguler nos émotions : malgré les échecs à répétition, on est aujourd’hui aussi pathétiquement naïfs qu’on ne l’était en C1.